Jaunisse de la betterave : comment pallier l’interdiction des néonicotinoïdes ?
Coup de massue pour les producteurs de betteraves : la Cour de Justice européenne a interdit, le 19 janvier, le recours à une dérogation pour l’emploi des néonicotinoïdes en traitement des semences contre la jaunisse. Dédommagement financier en cas de perte, variétés tolérantes sont les premières solutions évoquées le 23 janvier par le ministre de l'Agriculture et les semenciers.
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Alors que la filière betterave attendait patiemment une dérogation pour l’utilisation en traitement de semences des néonicotinoïdes (NNI) pour la troisième et dernière année afin de lutter contre la jaunisse, la Cour de Justice de l’Union européenne a décidé, jeudi 19 janvier, d’interdire toute dérogation sur les NNI, quel que soit l’État membre, et ce dès cette année.
En 2022, 82 % des surfaces françaises de betteraves avaient été ensemencées avec des semences traitées NNI. Abasourdie par cette décision, la Confédération générale des producteurs de betteraves (CGB) a immédiatement réagi en demandant le soutien de l’État français.
Jusqu’à 70 % de pertes en 2020
« En l’absence d’alternatives efficaces déployables en 2023, qu’elles soient issues du PNRI ou non, la filière se retrouve au pied du mur, regrette Franck Sander, le président du syndicat, dans un communiqué. En effet, la catastrophe sanitaire de 2020 est toujours dans les esprits, avec une perte moyenne de rendement de 30 % au niveau national, les exploitations les plus touchées ayant perdu jusqu’à 70 % de leur récolte dans certaines régions. À un mois et demi des semis de betteraves, c’est une immense déception pour toute notre filière qui plonge les betteraviers dans un grand désarroi. En l’absence de solutions efficaces, les surfaces risquent de baisser sensiblement. »
Le programme PNRI, destiné à trouver des solutions alternatives, entame sa troisième année de recherche et les mesures identifiées ne sont pas encore opérationnelles. Des traitements insecticides foliaires existent mais ne sont pas complètement satisfaisants et nécessitent parfois de multiples interventions.
Une indemnisation « totale » des pertes
En plus d’encourager toutes les mesures alternatives, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a annoncé lors d’une réunion avec l’ensemble de la filière betteravière, à Paris, lundi 23 janvier, qu’il mettra en place un accompagnement financier pour soutenir les planteurs en cas de pertes de rendements liées à la jaunisse.
« C’est une nécessité absolue pour rassurer les planteurs, à condition que ces pertes soient totalement prises en charge et de n’avoir ni franchise, ni plafonnement des aides », insiste Franck Sander. Le ministre va aussi déclencher une clause de sauvegarde auprès de la Commission européenne afin de s’assurer que les semences, betteraves et sucre de betterave importés en 2023 ne seront pas traités avec des néonicotinoïdes.
Premières variétés tolérantes
« Nous proposons cette année trois variétés qui présentent une certaine tolérance à la jaunisse : Giono, Curie et Rodin, explique Emmanuel Sterlin, responsable marketing de Deleplanque. C’est une première étape, mais elles ne permettent pas de s’affranchir des traitements insecticides en végétation si des pucerons sont présents. Nous avons également en cours d’inscription au catalogue officiel français une dizaine de variétés issues d’un programme de sélection spécifique qui présentent, elles, une efficacité plus intéressante contre la jaunisse, un rendement de 85 % en cas de très forte infestation de pucerons, de 90 % en cas d’infestations moyennes. Les premières d’entre elles devraient être inscrites d’ici à février, et les premières semences disponibles en 2024 ».
Même échéance annoncée chez SESVanderhave du Groupe Florimond Desprez : « En 2024, nous pensons proposer des variétés avec un certain niveau de tolérance, c’est-à-dire avec un déficit de productivité de l’ordre de 15 à 20 % en cas de forte attaque de jaunisse par rapport à ces mêmes variétés traitées avec les NNI, indique Alice Lorriaux, responsable marketing chez le semencier. Ce déficit de rendement devrait être très fortement réduit en 2026-2027. Les variétés tolérantes aux nématodes semblent pouvoir profiter des mêmes progrès en tolérance jaunisse que les variétés simple rhizomanie. »
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